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Cette synthèse sur le Dictionnaire philosophique de Voltaire dégage les lignes de force d’une œuvre majeure témoignant de l’univers d’un homme de lettres qui, dans sa retraite de Ferney, donne libre cours à sa « damnée insolence » et devient une puissance intellectuelle de l’Europe du XVIIIe siècle. Rassemblant des articles, libres propos qui se font tour à tour parodies des dictionnaires, facéties, récits, dialogues philosophiques, méditations dans une œuvre alphabétique qui n’exige point de « lecture suivie », Voltaire prétend offrir de quoi réfléchir « à quelque endroit qu’on l’ouvre ». La discontinuité n’est pas un obstacle à la cohérence de l’ensemble, structuré en profondeur par des convictions fortes. Dans cette Raison par alphabet, titre d’une édition de 1769, Voltaire traduit devant le tribunal de la raison les horreurs et les absurdités des religions persécutrices, mène croisade en faveur d’un théisme débarrassé des superstitions et du fanatisme. Voltaire invite son lecteur à oser penser par lui-même. Ce dernier y est puissamment aidé par la mise en ordre des faits, par la force d’un style polémique, par les jeux de l’ironie, par le tempo d’une pensée allègre. Christine Mervaud étudie l’histoire du texte, en dégage les enjeux, analyse quelques aspects de son art éblouissant et montre que le Dictionnaire philosophique est l’un des recours possibles contre les pesanteurs des conformismes et des orthodoxies. Date de première édition : 1994.
Le débat d’idées peut-il tuer le roman ? Les dix-huit études ici réunies montrent avec une grande originalité comment, au contraire, il vivifie le genre en influençant en profondeur le projet, la structure, l’écriture d’œuvres romanesques multiples et comment il constitue un facteur d’unité du roman français à travers les siècles. De Rabelais à Butor, de Mme de Lafayette à Martine Robier, de Robert Challe, Marivaux, Voltaire, Diderot, à Proust, Martin du Gard, Sartre, Vercors, Camus, Aragon, Simone de Beauvoir, en passant par Mme de Staël, Benjamin Constant, Stendhal, Eugène Sue, Flaubert, etc., le roman français invente des mises en scène, des dénouements, des inachèvements qui mettent en relief la confrontation des idées : conversations entre personnages, dialogues du romancier avec son lecteur, échanges entre les peuples de l’Europe, par exemple entre Allemands et Français, joutes théoriques des écrivains entre eux. Par sa large audience, le roman est un puissant moyen de diffuser les idées, que les particularités du genre modifient ou infléchissent inévitablement. La conclusion pessimiste de cette vaste enquête novatrice met en évidence les menaces que les évolutions récentes du genre font peser sur cette féconde tradition du roman français.
Voici un ouvrage dans lequel on découvre une partie négligée de l’œuvre de Balzac. En effet, un examen attentif de la nature et des procédés de son théâtre n’a été qu’à peine amorcé par la critique. Cette étude est une tentative pour réparer l’injuste oubli. Prenant en considération un corpus de sept pièces achevées (les ébauches dépassent la centaine), elle s’attarde à dévoiler la spécificité et l’essence de l’univers de la représentation et à démonter les subtils mécanismes qui régissent l’exhibition du langage dramatique. Outre à une lecture plurielle et minutieuse, cet ouvrage se propose surtout, en dernière instance, de montrer que le théâtre de Balzac, malgré ses manques et ses défauts, s’inscrit pleinement dans la conception que le célèbre écrivain avait de l’art et de la littérature, et que sa déconsidération est un obstacle à la compréhension d’une œuvre qui doit-être livrée dans sa globalité à la postérité.
Le Naturalisme et ses auteurs du XXe siècle sont bien connus et étudiés depuis longtemps dans les établissements scolaires. Mais ce mouvement ne se limite pas aux territoires de la France. Cette école se présente dorénavant comme une littérature à la fois culturelle et sociale, qui a aidé à façonner notre modernité actuelle. La recherche en lien avec ce mouvement littéraire s’est étendue dans de nombreux pays. Le Colloque international tenu à Varsovie en septembre 1984 a réuni de nombreux spécialistes afin d’assembler les recherches collectives à ce sujet. L’intérêt suscité par ce mouvement littéraire a permis de consolider le savoir connu à son propos et d’établir les pistes à explorer. Les articles de ce Colloque s’établissent comme l’une des étapes marquant la diversité et l’importance de ce mouvement littéraire.
L’Antiquité tardive (IIIe-VIe siècles) est une époque de profonde mutation. À la survivance de la culture classique se superpose un âge nouveau de la spiritualité, marqué par l’essor et la victoire du christianisme. Quel que soit l’objet particulier d’étude abordé, on ne saurait faire l’économie d’une approche qui tienne compte du fait religieux, omniprésent dans la vie quotidienne et dans la culture de tout Romain de l’époque tardive. Dans sa préface, Jean-Marie Salamito revisite la notion même d’Antiquité tardive. Au cœur du monde gréco-latin des IVe Ve siècles, se durcit le conservatisme culturel des derniers païens, tandis que la culture antique se transmet au christianisme dans des œuvres profanes, et qu’émergent une société, une littérature et un art proprement chrétiens.
Envahie par des volutes de fumée en 1950, la France est aujourd’hui en passe de devenir un pays non-fumeur. Le sevrage est encouragé alors qu’hier, c’est la consommation qui l’était. Comment est-on passé d’une France du tout tabac à une France de non-fumeurs ? Comment le SEITA, devenu la SEITA en 1980, unique fabricant national de tabac, a-t-il pu pendant des décennies promouvoir la cigarette, pour le plus grand profit du Trésor public, mais au risque de ruiner la santé de milliers de fumeurs ? Histoire d’une entreprise et d’un marché, histoire d’un produit de consommation des plus banals, ce livre est surtout l’histoire de l’apogée et du déclin de la civilisation du tabac. La SEITA, instrument d’État qui a longtemps favorisé la consommation, est confrontée à partir des années 1970 au retournement de la demande sociale et à la naissance d’une politique de santé publique. Engagée dans la mondialisation, l’entreprise a utilisé toutes les armes du marketing et de la publicité pour affronter les grands conglomérats anglo-saxons, jusqu’au moment où elle a été absorbée par l’un d’entre eux.
L’année 2007 marque le soixantième anniversaire du traité franco-britannique de Dunkerque. C’est, en effet, le 4 mars 1947 que Georges Bidault et René Massigli pour la France, Ernest Bevin et Alfred Duff Cooper pour le Royaume-Uni l’ont paraphé sur le lieu même où quelques années plus tôt le corps expéditionnaire britannique avait dû réembarquer sous la poussée allemande. Mais qui connaît le traité de Dunkerque ? Et pourtant le traité de Dunkerque constitue le premier traité d’alliance entre la France et le Royaume-Uni, couronnant d’une certaine manière l’Entente cordiale dont on a fêté le centenaire en 2004. Négocié en trois mois au cours de l’hiver 1947, il est l’aboutissement d’un lent processus qui a commencé dès le milieu de la Seconde Guerre mondiale. L’auteur y décrit les raisons de cette conclusion tardive, illustration des relations parfois difficiles entre les deux peuples. Souvent présenté comme un traité au contenu limité et obsolète dès sa signature même, le traité de Dunkerque est pourtant tourné vers l’avenir puisqu’il est à l’origine du Pacte de Bruxelles de 1948, lui-même prélude au Pacte Atlantique de 1949.
Quarante ans après la grande rupture marquée par les commentaires classiques de Sylvain Zac, Martial Gueroult, de Gilles Deleuze et d’Alexandre Matheron, ce volume fait le point sur les nouvelles approches de l’œuvre de Spinoza : de nouvelles lectures sont apparues, de nouvelles méthodes ont été éprouvées, des rapprochements inédits avec la littérature, les sciences sociales, le droit, l’économie ou la politique ont permis de déchiffrer la philosophie de Spinoza autrement. Jusqu’au milieu des années soixante, l’écho de la philosophie de Spinoza se trouvait divisé entre, d’une part, une réputation de difficulté et d’opacité et, d’autre part, une figure support de légende et semblait n’avoir guère de rapport avec, par exemple, le développement contemporain des sciences humaines. Pourtant, au sein même de celles-ci, certains pouvaient s’en inspirer silencieusement, de même que certains écrivains le mentionnaient ou le faisaient apparaître dans leurs œuvres ; mais cette inspiration et ces apparitions ne faisaient pas l’objet d’une reprise problématique du côté des philosophes. Il importe donc de rendre au spinozisme sa spécificité et sa rigueur en tant que philosophie, et de mesurer sa capacité à étendre son questionnement hors du champ proprement philosophique. La recherche tend à actualiser Spinoza : prendre au sérieux son intérêt pour les sciences de la nature, de la vie et de la société – et réciproquement découvrir l’intérêt que peut présenter pour ces disciplines la lecture de Spinoza. Autrement dit : à la fois interroger Spinoza sur son rapport à ces matériaux, et prendre en vue ce que l’état actuel de ces pratiques ou ces disciplines peut gagner à une confrontation avec le spinozisme. En somme : Spinoza à l’intérieur et à l’extérieur du spinozisme.
Il faut lire les Nouveaux Essais sur l’entendement humain de Leibniz à la fois comme un grand livre de philosophie et comme une grande œuvre littéraire. Ils ne se résument pas à une confrontation figée entre les grandes thèses de l’Essai sur l’entendement humain de Locke et les grands principes de la philosophie leibnizienne. Ce qui sépare les deux philosophes n’est pas une série de réponses à apporter aux mêmes questions, mais un ensemble de différends sur la manière de poser les questions. Dès lors, le débat philosophique exige un dispositif rhétorique surmontant la disparité des réseaux conceptuels et des langages philosophiques. Le dispositif choisi par Leibniz est une intrigue au cours de laquelle un personnage est conduit comme malgré lui d’une conviction philosophique à une autre. Philalèthe adresse à son interlocuteur non pas un copier-coller des propositions de Locke mais leur réécriture, riche des écarts nécessaires à son aventure philosophique personnelle.
Période de bouleversements religieux profond en Europe, les XVIe et XVIIe siècles ébranlent fortement et définitivement l’édifice religieux chrétien pour faire de ce dernier une nébuleuse de différents courants s’affrontant dans une série de violents conflits. Ces affrontements, terreau de différents travaux d’importance majeure en histoire, reste toujours encore sujet à la recherche et à la réflexion. Issu d’un colloque, cet ouvrage se penche sur ce sujet via plusieurs approches. D’abord par le biais des réformés en France mais aussi en Angleterre ; les différents composantes de guerres qui durèrent plus d’un siècle et enfin les affrontements au sein du Saint-Empire qui réussit à devenir un modèle de coexistence confessionnelle.
Il y a chez Rimbaud les Sodomes, les Florides, les Alleghanys, les Libans et les Asies, entre autres lieux de la géographie imaginaire du poète. Nous avons décidé d’étendre l’usage de ce pluriel à l’expérience scripturale et existentielle de l’Afrique par le voleur de feu, et par là de dérégler tous les sens possibles de ce mot lui-même dans la lecture de son œuvre : signification et parcours, désir et chagrin, présence et processus, périple lancinant, éternel retour : Chypre, Harar, Aden, Arabie, Orient, Abyssinie, rêves précaires, poétiques risquées, tristes tropiques. Zanzibar et Aphinar. Cette Afrique comme allégorie démultipliée et réalité du néant, elle est peut-être toujours déjà là chez Rimbaud, des compositions de l’enfant aux derniers mots de la correspondance. Premiers phantasmes, ultimes désolations : ce sont des Afriques, savez-vous, eût-il pu dire, et les essais repris dans ce volume nous y invitent.
Consacré aux Circulations internationales en Europe des années 1680 aux années 1780, le volume met en évidence l’importance des communications transfrontalières dans l’Europe des Lumières. Une attention particulière est portée aux pratiques, contenus et modalités des circulations commerciales dans l’espace méditerranéen et dans l’Europe du Nord, en temps de paix comme en temps de guerre. En tenant compte du rôle des institutions, des règlements, des infrastructures et des objets mobilisés, les renouvellements de l’historiographie permettent d’éclairer les stratégies des maîtres des forges suédois pour maintenir leur suprématie sur les marchés occidentaux, grâce à un fer de haute qualité. Le rôle joué par les contraintes logistiques dans la circulation des armées, aussi bien que les limites du recours au transfert sous pavillon neutre, illustrent l’imbrication des diverses circulations internationales dans l’Europe au XVIIIe siècle. Aux circulations commerciales et manufacturières, à la mobilité des négociants, des gens de mer et des migrants s’ajoutent des circulations savantes, techniques et artistiques, qui mobilisent l’espace à des échelles variables. Un climat de rivalité alimente souvent soupçons et espionnage préindustriel : l’exemple du « pillage » des inventions hollandaises par l’Angleterre en fournit un bel exemple. Les différences dans la construction de la « science des mines » dans les mondes germanique et français, où l’ingénieur est considéré soit en fonction de la légitimité du savoir d’État, soit en raison de sa maîtrise des savoirs savants, suscitent une réflexion sur la formation des acteurs (exploitants et techniciens). Au sein de la République des lettres, les échanges et confrontations des idées, cultivées dans la sphère aristocratique et princière, sont favorisés par La Correspondance littéraire de Friedrich Melchior Grimm, qui sert à la fois d’observatoire et de vecteur des valeurs du monde et de l’homme de goût, tandis que les réseaux alpins des libraires briançonnais et des colporteurs et libraires tessinois, centrés sur la France et la Suisse, avec Genève comme entrepôt de redistribution et atelier de fabrication, fournissent les axes de la circulation de l’imprimé en Europe.
Qui est vraiment Baudelaire ? Quelles ont été les motivations et les répercussions de son désormais célèbre recueil intitulé Les Fleurs du Mal ? D’aucuns le cantonneraient au rôle de dandy élitiste, de poète marginalisé. À moins de le restreindre à une poétique de « mal du siècle ». D’autres forgeront sa gloire. C’est le cas, de Barbey d’Aurevilly qui le désigne comme étant le « Dante d’une époque déchue », là où Sainte-Beuve à la réception des Fleurs du Mal, lui envoie une lettre résumant précisément sa pensée : « Vous avez pris l’enfer, vous vous êtes fait diable. » L’acte de colloque présenté les 10 et 11 janvier 2003 est placé sous le signe de la curiosité. Curiosité pour Baudelaire, ses Fleurs vénéneuses, et plus largement pour tout ce qui a trait à la poésie du XIXe siècle. On y retrouve notamment un article intégral et inédit de Paul Bénichou issu d’une conférence prononcée à la Sorbonne, datant de 1996. Une plongée passionnante dans ce royaume dédié à l’imaginaire baudelairien, au spleen, aux limbes et mirages du Mal.
Cet ouvrage explore le thème des relations entre la Grande Guerre et la forêt, ses espaces, ses milieux et ses hommes. Il l’applique aux régions du Nord et du Nord-Est de la France, qui furent tour à tour zone frontière de 1815 à 1914, théâtre de la guerre de tranchées, zone rouge à la sortie du conflit, champ d’expériences de la Reconstruction. Le rôle joué par la forêt durant ces deux siècles de construction territoriale est encore mal connu. L’analyse porte sur l’évolution des attitudes vis-à-vis de la forêt, sur les questions d’aménagement, d’environnement, de gestion sylvicole, de protection, sur celles aussi des débats sociétaux autour de la patrimonialisation des sites de mémoire et de la valorisation touristique. Cette mise en perspective est appliquée aux principales forêts de mémoire et d’histoire, celles de la zone rouge de Verdun : nées il y a 80 ans sur les terres bouleversées du front, où longtemps on crut – ou laissa croire – que rien ne repousserait jamais, elles abritent maintenant une diversité biologique et paysagère reconnue et protégée par des labels et des classements. Pourquoi et comment ? Dans le contexte inédit de l’après-conflit, les forestiers ont exploré de nouveaux horizons scientifiques et techniques et ont participé à l’effort de redressement économique et social. Qu’en est-il aujourd’hui ? Quels sont les défis à relever pour l’après-centenaire ? Ce livre se propose d’apporter des éléments de réponse et d’ouvrir des perspectives pour l’avenir.
Où aller pour ne plus trouver de gendarmes, se lamente George Sand, en 1841 ? Pas dans la centaine de pays du monde où une gendarmerie a été créée sous différents noms, depuis la fin du XVIIIe siècle, après la sortie de cette institution de son berceau français ! Quelles sont les péripéties de cette expansion, entre importation forcée et choix délibéré, imitation et réinterprétation, hybridation et suppression ? Comment la gendarmerie française, organisatrice d’une trentaine d’institutions, les Carabinieri, la Guardia civil et les autres corps européens y participent-ils ? Que retient-on d’un « modèle gendarmique » à plusieurs facettes, et qui est parfois transformé en libre-service ? Que nous apprend cette diffusion d’une police à statut militaire sur les représentations dont elle est l’objet, ses fonctions multiples et les interrelations entre l’armée, l’État et la société ? Cet ouvrage propose une longue synthèse détaillée, vingt études de cas, un tableau synoptique de 122 institutions, 72 notices, des statistiques par continent et une carte de l’état des lieux en 1939 et 2015. Il élargit l’histoire, comparée et connectée, des systèmes policiers, qui ne sont pas seulement composés d’institutions à statut civil et de corps baptisés, confusément, « paramilitaires ». Il enrichit l’histoire des constructions étatiques et impériales, des relations internationales, de la colonisation et de la décolonisation, ainsi que celle des politiques de sécurité depuis la fin du XXe siècle.
« La Première Guerre mondiale commence comme la troisième guerre balkanique », observe l’historien américain Samuel Williamson Jr. Ce constat signifie que le conflit qui va embraser l’Europe commence en fait dès 1912. Consécutif au repli ottoman, les Balkans sont devenus une poudrière où se croisent et s’affrontent à la fois les intérêts des États de cet espace, décidés à chasser la Turquie d’Europe et à en récolter les dépouilles, et ceux des grandes puissances, notamment de l’Autriche-Hongrie et de la Russie, qui s’emploient à conserver ce mouvement sous leur contrôle, qu’elles cherchent à le favoriser ou à le retenir. Ces guerres recomposent la carte politique des Balkans. La Serbie, le Monténégro, la Grèce et la Roumanie en sortent agrandies, l’Empire ottoman affaibli, sans avoir été toutefois expulsé d’Europe. La Bulgarie, seule contre tous dans la seconde guerre balkanique, est la grande vaincue et rêve de revanche. L’Allemagne a retenu le bras de l’Autriche-Hongrie. Si elle lui a barré la route de l’Adriatique, celle-ci n’a pu empêcher la Serbie de doubler son territoire. Au lendemain de ces guerres, Vienne est bien décidée à ne plus rien tolérer à Belgrade. Bref, en ce début de 1914, les Balkans sont plus que jamais une poudrière. Le Concert européen a évité le pire, mais le pourra-t-il encore en cas de nouvelle crise ? Il suffirait d’une étincelle pour que la poudrière explose et que l’incendie s’étende cette fois au reste de l’Europe.
Les « spectateurs » ont constitué, tout au long du XVIIIe siècle, un phénomène journalistique d’une extraordinaire vitalité. Des dizaines de périodiques se sont inspirés, en France, du Spectator de Steele et Addison, qui venait de connaître en Angleterre un succès sans précédent dans l’histoire de la presse. Le Spectateur français de Marivaux est le seul de ces journaux dont l’audience dépasse aujourd’hui le cercle des spécialistes. Ces périodiques oubliés méritent pourtant d’être redécouverts. Qu’ils se baptisent « censeur », « misanthrope », « spectatrice », « spectateur suisse » ou « inconnu », les auteurs de ces feuilles volantes ont largement contribué à renouveler le ton du journalisme littéraire. Les trois périodiques de Marivaux occupent, bien entendu, une place centrale dans l’histoire de ces journaux. Mais, aux yeux mêmes de ses confrères, l’auteur du Spectateur français est demeuré un modèle insaisissable, trop singulier pour être vraiment imité. C’est la naissance de ce « monde des spectateurs », dominé par la figure inclassable de Marivaux, que cet ouvrage tente de raconter.
Comment a été écrite l’histoire des Juifs d’Afrique du Nord ? L’ouvrage répond à cette question – qui n’a jamais été réellement posée jusqu’à présent – en s’intéressant à ceux qui ont fait l’historiographie des Juifs du Maghreb, aux méthodes et aux sources qu’ils ont utilisées, ainsi qu’au public touché. L’étude se déroule précisément dans le contexte de la société coloniale. Du fait de la mainmise française au sud de la Méditerranée, les Juifs entrent progressivement dans la modernité occidentale. Si l’on doit admettre que les récits historiques ne sont pas absents de la littérature traditionnelle, il n’en reste pas moins que l’histoire, en tant que genre savant tel qu’il était en train de se développer en France, se diffuse à partir du XIXe siècle dans le monde juif. Le passé juif devient donc objet d’histoire, une histoire écrite en français, à destination d’un public varié, juif ou non. Les premiers historiens avaient été d’abord des membres des élites juives, venus de France ou formés dans la métropole. Si les auteurs juifs avaient été nombreux, ils ne furent pas pour autant les seuls à s’intéresser au destin des israélites en terre maghrébine. Du fait de leur position singulière, les Juifs ne manquèrent pas de susciter la curiosité des savants coloniaux qui s’étaient penchés sur leurs origines et plus spécifiquement sur leurs liens avec les populations berbères. Ainsi le passé juif entra-t-il dans la bibliothèque coloniale, par le biais d’ouvrages érudits ou d’articles parus dans des revues publiées à Alger ou à Rabat. L’ouvrage embrasse donc la littérature historique sur les Juifs du Maghreb disponible en langue française depuis le milieu du XIXe siècle jusqu’aux années 1950. Au-delà de l’aspect historiographique, il propose une réflexion sur l’évolution du monde juif maghrébin au temps de la domination française et sur les modalités de son inscription dans une modernité importée par les puissances de l’heure. Il interroge également le regard porté par le monde non juif sur les judaïcités d’Afrique du Nord. Ainsi ce livre se présente-t-il comme leur histoire culturelle et sociale à la période coloniale.
Publiées pour la première fois en 1721, les Lettres persanes offrent le paradoxe d’une œuvre ayant bénéficié d’un succès immédiat et vite devenue un « classique », objet de très nombreuses imitations et d’innombrables commentaires, bref d’une œuvre semblant n’avoir plus guère de secret à révéler ; mais qui, à bien des égards, reste pourtant quasi insaisissable. Non seulement, parce que cette « espèce de roman » (selon la désignation tardive des « Quelques réflexions sur les Lettres persanes » publiées de manière posthume en 1758) se dérobe à toute catégorie générique clairement identifiable, mais parce que le dispositif épistolaire conçu par Montesquieu repose à la fois sur le principe d’une fragmentation de la matière et sur celui d’une « chaîne secrète et en quelque façon inconnue » (selon une autre formule fameuse de ces mêmes « Réflexions ») qui impose de lire l’œuvre au croisement de la fiction et de la philosophie, de l’économie des passions et de la réflexion morale, de la satire et du discours politique. C’est précisément cette série d’articulations que les seize études ici réunies s’efforcent de saisir. Traitant de sujets distincts et aussi variés que possible, elles se rejoignent toutes néanmoins dans une même exigence : lire les Lettres persanes non pas en focalisant l’attention sur tel ou tel aspect qui rendrait plus ou moins aveugle à tous les autres, mais en prenant la mesure d’un jeu de métaphores généralisées qui implique de mettre en regard l’Orient et l’Occident, le roman de sérail et les considérations théoriques, la réflexion politique et le discours satirique sur la France du temps.
Les vingt années séparant le traité de Paris de 1763, qui met fin à la guerre de Sept Ans, de celui de Versailles, qui marque, en 1783, le terme de celle dite d’Indépendance américaine, ont connu une course aux armements navals d’une intensité toute particulière et qui se poursuivit jusqu’au cycle des guerres révolutionnaires. On attendait beaucoup des marines et, lorsque la guerre fut venue en 1778, c’est à elles que se trouva suspendu le sort de puissantes et vieilles nations comme celui des très jeunes États-Unis d’Amérique. À l’initiative de la Société des Cincinnati de France et du Laboratoire d’histoire et d’archéologie maritimes (FED 4124) de l’université Paris-Sorbonne, des historiens des États-Unis, du Canada, de Grande-Bretagne, d’Espagne et de France examinent dans ses missions, sa complexité et son coût l’instrument naval dont disposait chacun des principaux belligérants. Désenclavant l’histoire des marines de guerre, ils montrent combien celle-ci est inséparable de l’étude de la prise de décision politique, des finances des États, des appareils productifs, des circuits d’approvisionnements, des modes de recrutement et d’entraînement des hommes. Ce premier tome sur l’instrument naval sera suivi d’un second sur la mise en œuvre opérationnelle.